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Maria da Penha (Viktor Braga/Fotografia UFC/Flickr)

Ça fait du ramdam au Brésil : 12 ans après, la loi Maria da Penha toujours plus nécessaire

Toutes les deux heures, une femme est tuée au Brésil, 7e pays le plus violent au monde envers les femmes. En 2017, sur 4 473 victimes d’homicide volontaire (+6,5 % par rapport à 2016), 946 l’ont été parce qu’elles étaient des femmes (+16,5 %). Le centre d'appel pour les femmes victimes de violence a lui reçu depuis le début de l'année près de 80.000 appels, soit un appel pour dénoncer un abus (sexuel, physique, moral...) toutes les quatre minutes. Alors qu’était commémoré mardi le 12e anniversaire de la loi Maria da Penha, le Brésil a toujours autant de mal à endiguer la violence faite aux femmes.

Il se sera écoulé 23 ans entre la première tentative d’assassinat à l’encontre de Maria da Penha par son mari jusqu’à la promulgation par Lula de la loi qui porte le nom de cette ingénieure en chimie pharmaceutique du Ceara. En 1983, déjà victime de violences conjugales, Maria da Penha, 37 ans, prend une balle dans le dos alors qu’elle dormait. Auteur du tir, son mari d’origine colombienne, Marco Antonio Viveros, invoque alors une tentative de cambriolage.

Seconde tentative d'assassinat quelques mois plus tard

Le calvaire se poursuit alors pour la Brésilienne, devenue paraplégique, qui subit toujours autant d’agressions de la part de son mari jusqu’à une seconde tentative d’assassinat par électrocution quelques mois plus tard. Par deux fois, en 1991 et en 2002, Marco Antonio Viveros est condamné par la justice brésilienne, mais il n’est emprisonné qu’après la seconde condamnation, à huit ans de prison, sortant au bout de deux ans.

Maria da Penha, qui a lutté plus de 15 ans pour la condamnation de son mari, obtient également celle du Brésil en 2001 par la Commission interaméricaine des droits de l’homme de l’Organisation des Etats américains. Son cas est emblématique de l’impunité dont jouissaient jusqu’alors les auteurs de violences conjugales au Brésil et du manque de prévention et de protection des femmes.

Deux lois spécifiques en 2006 et 2015

La création d’une loi spécifique est alors enclenchée et aboutit à la loi fédérale 11.340/06 dite Maria da Penha. Celle-ci reconnaît la gravité des cas de violences conjugales à l’encontre de toutes les femmes (qu’elles soient hétérosexuelles, homosexuelles ou transsexuelles). Les violences familiales sont également inclues, c’est-à-dire que la loi recouvre également les agressions commises par des proches, notamment des membres de la famille. Tous les types d’agressions sont concernés, pas seulement physiques. Grâce à la loi Maria da Penha, les violences envers les femmes sont ainsi devenues des circonstances aggravantes, garantissant la protection des victimes et l’emprisonnement des auteur(e)s – les peines vont de trois mois à trois ans de prison.

Afin de compléter la loi Maria da Penha, qui n’inclut pas les homicides volontaires, une loi sur le féminicide a été votée en 2015, prévoyant des peines plus lourdes lorsque le crime a été commis parce que la victime était une femme. Au Brésil, ces assassinats arrivent la plupart du temps après des séparations, rappelle G1.

Sur les réseaux sociaux, le 12e anniversaire de la loi Maria da Penha a ainsi été largement commenté alors qu'il a lieu au coeur d'une actualité tragique pour les femmes brésiliennes.


« Aujourd'hui, la loi Maria da Penha a 12 ans. Ou plutôt, cela ne fait que 12 ans que notre pays possède une loi qui protège les femmes contre la violence physique et verbale. Rien que lors des dernières 48 heures, 5 femmes ont été assassinées par leur mari au Brésil. Longue vie à la loi Maria da Penha ! »


« Toutes les 2 heures, tous les jours, une femme meurt au Brésil. Aujourd'hui, cela fait 12 ans que la loi Maria da Penha a été promulguée, de nombreuses femmes ont eu le courage de dénoncer ceux qui abusaient d'elles. Il y a encore beaucoup à faire, à combattre. Courage à nous, femmes ! »

D'autres internautes, à travers des témoignages, rappellent que le chemin est encore long, rien que pour que la loi Maria da Penha soit pleinement appliquée :


« Aujourd'hui c'est l'anniversaire de la loi Maria da Penha, mon oncle a eu une audience judiciaire pour avoir frappé son ex-femme et a été relaxé. Il s'est présenté ivre devant la justice et a été relaxé. Ce monde ne tourne pas rond... »

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