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La Chambre des députés brésilienne (Fabio Rodrigues Pozzebom/Agência Brasil)

Ça fait du ramdam : le mercato des partis politiques brésiliens est ouvert

Au Brésil, on change de parti politique comme de chemise, ou presque. La pratique est tellement habituelle que depuis 2015, un véritable mercato a été instauré pour les députés fédéraux par la législation électorale. Il permet, durant une période donnée, de changer d'étiquette sans être sanctionné. La dernière fenêtre avant les prochaines élections d’octobre prochain a été ouverte jeudi dernier - et ce jusqu'à début avril. Quinze élus en ont déjà profité pour aller voir ailleurs.

Il faut dire qu’avec 35 partis politiques officiels à l’heure actuelle - et 56 en attente d’homologation par le Tribunal supérieur électoral, le choix est vaste pour trouver celui qui correspondra le mieux à sa vision – en considérant que l’opportunisme n’existe pas en politique.

135 élus ont changé de parti en trois ans

Au total, au cours de la mandature actuelle, débutée en janvier 2015, G1 a relevé qu'un quart des députés fédéraux avait été prendre une carte ailleurs. Cela représente 135 élus (sur 513) et 34 d'entre eux ont été jusqu'à changer plusieurs fois de parti ces trois dernières années.

Le grand mercenaire de la Chambre des députés cette saison est Adalberto Cavalcanti (Pernambouc), qui a connu quatre changements en moins de deux ans. Elu sous étiquette Partido trabalhista brasileiro (PTB), il s’est transféré au nouveau Partido da mulher brasileira (« Parti de la femme brésilienne », un parti non-féministe composé en majorité d’hommes malgré son nom) puis au Partido trabalhista do Brasil (PTdoB, des dissidents du PTB, d’où le nom très proche) avant de revenir au PTB pour enfin terminer… au PTdoB de nouveau, qui a fini par changer de nom (Avante).

Le nouveau parti de Jair Bolsonaro, grand gagnant du dernier mercato

Cela paraît facile, mais il faut tout de même justifier à chaque fois son transfert sous peine de perdre son mandat pour « infidélité ». Les critères sont les suivants : fusion de partis, création d’un nouveau parti, dérive du programme du parti ou discrimination personnelle grave. Néanmoins, G1 fait observer qu’il y a eu une quarantaine de transferts hors période de mercato lors de cette mandature, les partis s’arrangeant entre eux pour rester dans le cadre de la loi.

Depuis l’ouverture de cette dernière fenêtre de « troca-troca », le plus gros recruteur est le Partido social liberal (PSL) qui a récupéré en son sein huit nouvelles têtes, dont des gros poissons, les Bolsonaro père et fils, le premier se présentant à l’élection présidentielle et figurant en tête des sondages au premier tour.

Des spectateurs décontenancés

Mais si les fans de football adorent les périodes de mercato, quand cela concerne les partis politiques, c’est plutôt la colère qui prédomine du côté de l’opinion publique et des médias brésiliens. « Idéologie, contenu du programme, débat d'idées, respect de l'électeur. Tout cela semble être resté dans le passé. Tout comme la loyauté partisane », critique sur son blog le journaliste politique brésilien Sergio Montenegro. D’après lui, la plupart de ces transferts se rapprocheraient du monde sportif puisque les élus seraient grassement payés (jusqu’à 2,5 millions de reais) pour changer de parti, permettant de renforcer ceux à la recherche de plus d’élus pour plus de subventions, d’espace publicitaire audiovisuel gratuit pour faire campagne et de pouvoir de pression sur le gouvernement.

Son homologue d’UOL, Josias de Souza, est encore plus radical, comparant les partis politiques brésiliens à des bordels et leurs membres à des prostituées : « On dit souvent que la politique est le deuxième métier le plus vieux du monde. Mais elle ressemble beaucoup au premier. Avec une différence : c’est le déficit public qui paye la passe. »

Du côté des internautes brésiliens, cela grince également des dents :

« Le mercato du football est ouvert... les clubs engagent des joueurs. Le mercato des partis politiques est ouvert. Les Parlementaires discutent de tout sauf d'idéologie partisane. »

« Pourquoi on change aussi souvent de parti politique au Brésil ? Pour des raisons idéologiques ou de subventions aux partis ? »

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