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les escales(Les Escales/DR)

Cap sur São Paulo pour la 28e édition du festival musical Les Escales

Le festival musical Les Escales, qui se déroule à Saint-Nazaire (Loire Atlantique), propose chaque été un voyage musical au public. Une programmation éclectique où pop, rock, soul, world ou encore électro se côtoient. Pour sa 28e édition, qui aura lieu du 26 au 28 juillet prochains, des artistes français et internationaux tels que Franz Ferdinand, Charlotte Gainsbourg, Bernard Lavilliers, Manu Dibango ou encore Orelsan et Lomepal investiront les scènes installées sur l’île du Petit Maroc. Le festival choisit par ailleurs de faire un focus chaque année sur les musiques actuelles d’une ville dans le monde. Après Valparaiso (Chili), Detroit (Etats-Unis) ou l’an dernier Melbourne (Australie), l'événement a choisi pour cette édition de poser ses valises à São Paulo et de sélectionner les artistes les plus représentatifs de la scène locale actuelle. Bom Dia Brésil a rencontré Jérôme Gaboriau, le programmateur des Escales.

En quoi vous a-t-il semblé intéressant de faire un focus sur São Paulo pour cette nouvelle édition des Escales ?

Jérôme Gaboriau (DR)

Depuis six ans, à l’occasion de chaque édition du Festival, on essaye de valoriser une région, une esthétique du monde, en sélectionnant une ville emblématique de cette zone. Pour choisir cette destination, on mène beaucoup de travail en amont. Et notre choix s’est porté sur São Paulo, car pendant notre phase de recherche, d’autres professionnels de la musique m’en ont plusieurs fois parlé. Quand on pense à cette ville, ça évoque un vrai brassage de cultures. On pense bossa nova, mais aussi musique d’héritage africain.

Vous avez eu l’occasion de venir à deux reprises dans la capitale pauliste au cours des six derniers mois. Quelle impression la ville vous a-t-elle faite ?

J’ai été marqué par cette ville immense, mégalopole qui regroupe les extrêmes, tant sur le plan de la richesse, que sur les prises de position par rapport à des faits sociétaux. C’est une ville folle où la circulation est permanente. On a un peu l’impression d’être à Gotham City !

Et sur le plan musical, comment avez-vous ressenti la dynamique artistique ?

J’ai assisté à beaucoup de concerts, rencontré beaucoup d’artistes. Et j’ai été marqué par cette idée de lutte contre un système existant dans laquelle ils sont engagés de manière générale. Elle passe par une création musicale aux accents urbains et contemporains. En exploitant des sons propres à la culture brésilienne (percussions) et en utilisant la technologie avec des touches électroniques, hip-hop, il y a une réelle réinvention de styles, s’appuyant sur des textes engagés. C’est par exemple le cas d’Edgar ou du groupe Teto Preto. On a l’impression d’un projet de vie exprimé à travers des sons très propres à la ville de São Paulo. Les artistes décrivent dans un discours franc, direct, ce qu’ils vivent et comment ils aimeraient voir leur pays évoluer, ce qui a un aspect visionnaire. Mais ça ne passe pas par un engagement dans un parti politique précis. On le sent aussi dans les événements qu’ils organisent, où ce sont plus des rassemblements générationnels qu’un seul spectacle musical.

Pensez-vous que cet aspect pourra être perçu par les festivaliers français ?

On l’espère ! Après nos premières divulgations de noms d’artistes qui seront présents, on sait déjà qu’il y a une grosse attente du public, qui semble comprendre qu’on va parler d’un pays en pleine mutation. Ils ont très hâte d’écouter le discours de ces artistes, ainsi que de les rencontrer.

Pouvez-vous nous parler un peu des artistes paulistes qui seront donc présents au festival en juillet ?

Quand on prépare la programmation, on cherche à présenter une image actuelle des sonorités de la destination qui a été sélectionnée. Et pour São Paulo, dans des univers aussi variés que la pop, le rap ou le hip-hop, il y a le nom des Demônios da Garoa qui est revenu à plusieurs reprises. Ils sont porteurs d’un héritage de la bossa pauliste et sont un emblème de la ville.

Tássia Reis, ça a été un vrai coup de coeur pendant un concert organisé dans la périphérie de São Paulo. C’est une artiste qui représente la fusion des sonorités : on sent tout le passif de la scène hip-hop, mais aussi le fait qu’elle a été bercée par le funk, la soul, le jazz, des musiques présentes sur la scène pauliste, qu’elle s’est réappropriée. Son concert voyage à travers le temps avec différents genres musicaux et ce phrasé hip-hop qui la distingue.

Sepultura, c’est chez nous l’image du groupe emblématique leader de la scène metal. Le metal et le rock sont aussi présents sur la scène de São Paulo et l’on avait aussi besoin de noms de ce genre, qui résonnent à l’oreille de notre public. On a aussi choisi avec Sepultura d’avoir une tête d’affiche du festival, prenant un peu le contrepied de ce qui aurait pu être attendu de nous, avec des artistes comme Gilberto Gil par exemple.

Teto Preto, je les ai également rencontrés à l’occasion d’un concert et ça a été un gros coup de coeur. Outre leur engagement pour la cause LGBT affirmé qui est percutant, il y a une qualité musicale indéniable, ainsi qu’une énergie toute pauliste. Ils vont à la frontière de la provocation, sans être vulgaires. Ils se servent des nouvelles technologies (beat hip-hop et techno), sans oublier d’où ils viennent puisque leur musicien travaille sur des percussions traditionnelles.

Encore un coup de coeur avec Edgar, ce jeune rappeur a été une magnifique rencontre artistique. Son concert a confirmé l’idée que je me faisais de la ville, à savoir que c’est quelque chose de très moderne. Il raconte son vécu dans un concert qui est comme un conte urbain, où il évoque cette vie hyperconnectée, de surconsommation. C’est un témoignage actuel d’une situation géopolitique et sociale de São Paulo. Et quelle présence sur scène !

Avec Céu, on va montrer un autre pan de la culture pauliste. C’est une des figures incontournables de la scène pop pauliste. Elle est engagée d’une manière moins évidente de prime abord que d’autres artistes de la programmation, mais son engagement féministe et politique est évoqué dans certains de ses textes, de manière poétique, moins directe.

Tropkillaz, ce sont des pionniers de la scène électro brésilienne. Ils ont su très vite s’exporter et collaborer avec des artistes étrangers de grand niveau, ce qui n’est pas si fréquent que ça.

Enfin, L_cio est un DJ dont les sets sont bercés par des sonorités qui rappellent les racines du pays. J’ai souvent entendu parler de cette volonté ces derniers mois de certains Brésiliens de gommer l’héritage noir du pays. Et bien L_cio s’inspire des sonorités provenant de cet héritage et les réinterprète de manière techno.

Ce n'est toutefois pas que l'aspect musical, mais aussi artistique de São Paulo que vous allez proposer avec le festival, puisqu'un graffeur pauliste va venir peindre un graffiti à Saint-Nazaire...

Quand on préparait le focus sur Valparaiso, au Chili, j'ai été marqué par le street art qu'on y voyait. On a donc invité pour la première fois un graffeur, Inti, à réaliser une fresque à l'occasion du festival. Et depuis, tous les ans, un artiste vient réaliser une oeuvre. Cette année, pour São Paulo, nous avons choisi Apolo Torres.

Pour en savoir plus, consultez le site de l’événement.

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