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(DR)

Comprendre le Brésil en un mot : c’est quoi le Cheque especial/Chèque spécial ?

Ancien cadre dirigeant d’une grande entreprise française au Brésil, Christian Pouillaude a vécu, travaillé, voyagé au Brésil depuis plus de 40 ans. Passionné de musique brésilienne (au point de collaborer avec Radio Latina) et de tout ce qui touche à son pays d’adoption, il vit aujourd’hui dans la ville de son épouse, Rio de Janeiro, et collabore avec Bom Dia Brésil à travers une chronique mensuelle intitulée Palabres. Palabres, car on ne peut pas comprendre le Brésil sans saisir toutes les nuances de certains mots du vocabulaire brésilien. Palabres, car ce sont des mots qui prêtent à la réflexion et à la discussion. Le deuxième volet de cette chronique se penche sur le cheque especial/chèque spécial. Vous pouvez la découvrir en version podcast ou simplement la lire ci-dessous.

 

C’est un mot qui revient fréquemment dans les conversations et on comprend même vite que l’angoisse des gens est de « tomber dans le chèque spécial » ! Mais qu’est-ce que ce « chèque spécial » ? Avez-vous déjà vu un chéquier de chèques spéciaux et la couleur d’un chèque spécial ? Évidemment non, car d’abord ce n’est plus un chèque et ensuite il n’a de spécial que le nom, sans doute inventé par un expert du marketing bancaire, il y a déjà longtemps.

Bref, aujourd’hui, ce fameux « chèque spécial » n’est en fait qu’un..…..simple découvert bancaire ! Mais compte tenu de l’état des finances domestiques de très nombreuses familles brésiliennes, on comprend facilement qu’il occupe une place stratégique dans leur vie quotidienne, surtout vers la fin du mois.

Quand des Brésiliens s’aperçoivent qu’ils n’arriveront pas à boucler leurs comptes et notamment à payer les mensualités qui courent, ils déploient alors des trésors de créativité en ingénierie financière ! On peut choisir de ne plus payer ses mensualités mais, pour en éviter de trop fâcheuses conséquences, la pratique la plus astucieuse consiste à « oublier » d’en payer une sur le nombre et ce de façon rotative : un mois, on ne paie pas le plan de santé, un autre on oublie la mensualité de la voiture, le troisième celle de la maison…

Bien sûr on accumule les retards mais ils restent acceptables par les créanciers et on espère toujours rapidement « se refaire ». On joue bien sûr sur les cartes de crédit en en multipliant le nombre et puis on « parcelle » au maximum possible le paiement de tout achat tant soit peu important : en 6, 10 ou 12 fois. Ce petit jeu, pratiqué à haute dose au Brésil, a ses limites mais des limites que l’on peut repousser bien loin : on négocie aussi le rééchelonnement du paiement de la propre facture de la carte de crédit !

Quand on a tout, tout épuisé, il ne reste plus que le recours…..au chèque spécial ! D’autant plus qu’il présente l’avantage d’être de l’argent immédiatement disponible. Le plus souvent ce sont des montants relativement limités (en centaines ou quelques milliers de reais) et il semble que les banques les accordent assez facilement et rapidement car il y a urgence. Le taux d’intérêt tourne autour de 13% : bon, ça peut aller dans le contexte brésilien. Ah oui ! Désolé, j’avais mal compris : 13% mensuel ! Aie, ça fait plus de 330% annuel ! C’est bien ça le gros hic du chèque spécial : son coût est absolument prohibitif. Il vous emmène insidieusement mais sûrement vers la boule de neige de l’endettement : facile de tomber dans le joli piège du chèque spécial, plus difficile d’en sortir. De la vraie drogue : un « chèque cadeau » empoisonné, en quelque sorte !

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