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Ce sont souvent aux entreprises de s’adapter aux horaires des matchs de la Seleção (Victor Coisplet/Bom Dia Brésil)

Coupe du monde : entre travailler et regarder les matchs, les salariés brésiliens ont choisi

Tous les quatre ans au Brésil, c’est le branle-bas de combat pour pouvoir assister à la Coupe du monde. Fous de foot, les Brésiliens entendent évidemment suivre les matchs de la Seleção, mais aussi tout le reste tant qu’à faire. Le pays étant rarement dans un décalage horaire favorable, avec des matchs le matin et l’après-midi comme pour ce Mondial russe, ce sont souvent aux entreprises de s’adapter à la bonne volonté de leurs salariés et non l’inverse.

« Quand le Brésil joue, personne ne travaille, je ne connais personne qui n’aime pas le football », tranche Leonardo, employé d’une entreprise de télécommunication. Comme tous les témoins interrogés par Bom Dia Brésil, il indique que sa société s’est adaptée au Mondial. La sienne en mettant à disposition un auditorium et des salles spécifiques pour assister aux matchs de la Seleção. « Nous pouvons aussi les voir chez nous ou à l’extérieur des bureaux, mais nous devons compenser ces heures en retour », précise-t-il.

« Le Brésilien est comme cela, il trouve toujours un moyen de regarder son match »

Alessandro travaille lui pour une fédération de commerces de l’Etat de Rio de Janeiro. « Les jours de match du Brésil, quand cela a lieu le matin ou l’après-midi, nous ne travaillons qu’une demi-journée, et nous suivons les autres matchs sur Internet ou à la radio, avec modération bien sûr, tout en travaillant », explique-t-il. « C’est une période compliquée pour tout le monde, nous avons la tête aux matchs, nous voulons savoir les résultats et il y a toujours quelqu’un pour essayer de regarder des bouts sur son ordinateur ou son téléphone même si ce n’est pas autorisé en théorie », renchérit Leonardo. « Le Brésilien est comme cela, il trouve toujours un moyen de regarder son match. »

Lors des rencontres du Brésil, c’est donc vraiment tout le pays qui s’arrête. Par exemple, les banques, qui n’ouvrent en temps normal que six heures par jour de semaine, ont le droit de fermer deux heures lorsque la Seleção est sur le terrain, soit quatre heures de fonctionnement seulement ces jours-là. Les commerces également ferment en général à ces moments-là. « Cela ne sert à rien d’ouvrir son magasin si le client est à la maison », justifie auprès de R7 Hélio Ferraz, vice-président de l’Association commerciale de Rio de Janeiro. Tant pis pour ceux qui n’aiment pas le football, mais en existe-t-il au Brésil ?

« Il faut que les services publics essentiels soient assurés »

Leonardo comme Alessandro reconnaissent donc une moindre productivité générale tous les quatre ans, même s’ils assurent que toutes leurs tâches sont effectuées quoi qu’il arrive. « Mais il faut dire aussi que nous travaillons avec les services municipaux, de l’Etat de Rio de Janeiro et fédéraux, et que eux aussi sont plus ou moins à l’arrêt durant la Coupe du monde, c’est une réalité brésilienne », précise le second en souriant.

En effet, les services publics semblent eux aussi suivre l’organisation du privé, ce qui ne plaît guère à Alessandro : « L’initiative du secteur privé est une chose, cela ne gêne personne qu’il s’arrête durant les matchs du Brésil, mais pour le secteur public, que le Parlement, les écoles ou encore les tribunaux s’arrêtent, je suis contre. Au maximum, qu’une télévision soit installée, d’accord, mais que plus rien ne fonctionne, non ». Leonardo concorde : « Il faut que les services publics essentiels soient assurés, tout fermer est impossible, des gens peuvent en avoir besoin. »

« La réalité est que le football est le sport le plus populaire du pays »

Luiz Fernando, justement, travaille au sein d’un tribunal fédéral de Rio. « En dehors des matchs du Brésil, durant lesquels les horaires de travail sont suspendus et nous ne travaillons qu’une demi-journée, nous ne pouvons pas regarder les matchs sur place, mais nous essayons de nous informer via notre smartphone », explique-t-il, mais pas via ordinateur. En effet, le jeune homme précise que les accès aux sites des chaînes sportives ont été coupés durant le Mondial.

Pour lui, il est parfaitement normal que des services, même publics, s’arrêtent au moins durant les matchs du Brésil : « La réalité est que le football est le sport le plus populaire du pays, les Brésiliens adorent ça et la Coupe du monde n’a lieu que tous les quatre ans. Si on imposait aux gens de travailler quand le Brésil joue, ils n’iraient pas ou travailleraient mal, avec des résultats négatifs. »

« Tant que le travail est fait, ce qui importe est le résultat »

Dans la banque publique d’investissement pour laquelle Renata travaille, une organisation spécifique a également été mise en place lors des matchs du Brésil. « S’ils ont lieu le matin, les horaires d’ouverture des bureaux ont été amplifiés, de 8h à 20h, permettant aux employés de faire leurs sept heures dans la journée, mais s’ils ont lieu l’après-midi, nous ne travaillons que le matin », détaille-t-elle.

Néanmoins, Renata a bien constaté que des collègues se débrouillaient pour voir les autres matchs au bureau d’une manière ou d’une autre. « Cela ne me dérange pas, tant que le travail est fait, ce qui importe est le résultat. Moi-même je travaille en écoutant de la musique, donc ils peuvent très bien travailler en écoutant la radio voire en regardant un peu les matchs, je ne pense pas que cela soit si préjudiciable que cela », estime-t-elle.

Un moindre enthousiasme cette année

Même si, comme Luiz Fernando, elle juge que des administrations peuvent arrêter leurs activités quand la Seleção est sur le terrain, au contraire de services essentiels comme les hôpitaux par exemple, elle confesse que c’est plus délicat : « Nous sommes plus la cible des critiques de la population parce que ce sont leurs impôts qui nous payent, mais il y a une certaine tolérance au Brésil sur le fait de s’arrêter de travailler durant ces occasions et cela profite aussi à ceux qui n’aiment pas le football. »

S’il faudra donc compter sur un Brésil quelque peu au ralenti durant ce mois de compétition, d’autant plus si la Seleção va loin, l’enthousiasme reste néanmoins mesuré parmi nos témoins. Renata se demande si elle ne va pas travailler pendant les matchs du Brésil, tandis que Leonardo dresse un constat amer : « Le pays va mal, le gouvernement, l’économie, la sécurité… je souhaite évidemment que le Brésil l’emporte, mais j’ai peur que cela fasse oublier aux Brésiliens la mauvaise situation dans laquelle nous sommes, car nous avons cette tendance à l’oubli. Et la Coupe du monde a toujours lieu les années d’élection présidentielle… »

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