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Cid Gomes, lundi 15 octobre à Fortaleza (Capture écran Youtube)

Ça fait du ramdam : Cid Gomes ou la désunion de la gauche brésilienne

Quand on a de tels amis, on n'a pas besoin d'ennemis. Lors d’un meeting de soutien à Fernando Haddad, candidat du PT à la présidentielle brésilienne, Cid Gomes, frère de Ciro (PDT), arrivé troisième au premier tour, s'est livré à un échange houleux avec des militants du PT lundi soir à Fortaleza. Après avoir dit le bien qu’il pensait d’Haddad et rappelé « qu’il n’aurait pas de problème » à voter pour lui, Cid Gomes a invité le PT à présenter un « mea culpa » aux électeurs brésiliens, à être « humble pour reconnaître qu'ils ont fait beaucoup de conneries », ajoutant que si ce mea culpa ne venait pas, le PT mériterait de « perdre l'élection », comme on peut le voir dans la vidéo ci-dessous. Et alors que dans l’audience certains militants protestaient avec véhémence, Cid Gomes a enfoncé le clou, en déclarant que le Parti des travailleurs avait « créé » Bolsonaro, et en invitant ces militants à tourner la page Lula : « Lula est en prison, connard, Lula est en prison. Et qu'allez-vous faire? Connard, connard. Ça c'est le PT, et le PT comme ça mérite de perdre, et il va perdre dans les grandes largeurs. »

Sur les réseaux sociaux, le défilé d'insultes a joué les prolongations entre défenseurs et adversaires de Cid Gomes. « Maintenant, je suis pétiste. Et fanatique. Pourquoi ? Parce que j’ai osé dire que Cid Gomes avait agi comme un imbécile », a ainsi commenté Pablo Villaça sur Twitter :

Haddad apprécie les « compliments »

Interrogé par la presse mardi à São Paulo sur la tirade de Cid Gomes, Fernando Haddad a préféré jouer l’accalmie : « Je ne ferai pas de commentaire à ce sujet car j'ai une amitié personnelle avec Cid, qui m’a fait des compliments. Je préfère regarder du côté positif », a déclaré le candidat du PT. Reste que pour la plupart des observateurs, l’ambiance au meeting de Fortaleza est révélatrice d’une profonde désunion de la gauche. En théorie, un front démocratique a été mis en place autour de la candidature de Fernando Haddad : il réunit notamment les partis PT, PSB, PCdoB, Psol, Pros et PCB. Mais le plus important de ces alliés du PT, le Parti démocratique travailliste (PDT) d’un Ciro Gomes qui a remporté 12,47 % des suffrages exprimés au premier tour, n’a souhaité qu’apporter un « soutien critique » au candidat adoubé par Lula. Et Ciro Gomes, actuellement en voyage en Europe, brille par son absence dans la campagne de soutien à Fernando Haddad. Il n’a peut-être pas oublié que pendant les mois qui ont précédé le premier tour de l’élection, le PT a œuvré à isoler son PDT, le coupant de ses alliés potentiels.

Pour Roberto Freire, le président du Parti populaire socialiste (PPS) cité par UOL, les déclarations de Cid Gomes sont une « simple réponse à la réalité » du traitement réservé par le PT à ses alliés ces dernières années. Un traitement « hégémonique » qui impose selon lui une « subordination ». Reste que, pour le président du Parti socialiste brésilien (PSB) Carlos Siqueira, également cité par UOL, si les critiques du PT exprimées par Cid Gomes avait « un fond de vérité », elles ne sont pas arrivées « au meilleur moment ». Pour lui, l'autocritique peut attendre face à ce que « la réalité impose », à savoir la forte probabilité de voir Jair Bolsonaro devenir le prochain président brésilien.

Le camp Bolsonaro se frotte les mains

Du côté des supporters de ce dernier, l’épisode « Cid Gomes contre le PT à Fortaleza » a été accueilli comme du pain bénit. Avec notamment de multiples mèmes sur les réseaux sociaux, le plus courant étant un détournement du nouveau logo de campagne de Fernando Haddad, le slogan réécrit devenant « Lula est en prison connard, vous allez perdre » :

Du côté de l’équipe de campagne de Jair Bolsonaro, on n’a pas perdu de temps non plus : selon la Folha de S. Paulo, le nouveau spot de campagne du candidat d’extrême-droite, qui doit être diffusé ce mercredi soir, s’ouvre par une voix off qui souligne que « Cid Gomes, frère de Ciro Gomes, dit la vérité, ce que le PT n'accepte pas », avant la diffusion d’un extrait de l'échange houleux de Fortaleza. Cid Gomes va-t-il songer à préparer son propre mea culpa ?

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