Dominique Boyer est arrivé par hasard au Brésil, mais a eu un déclic amoureux en entendant le portugais chanter à ses oreilles. Il a donc décidé quelques années plus tard de venir s'y fixer définitivement. Enseignant le français aux Brésiliens, il est amené à confronter quotidiennement les deux langues. Et à se poser quelques questions sur des mots semblant provenir de la langue de Molière, des gallicismes. Dans la chronique Mot pour mot, il revient donc sur certaines de ses trouvailles et nous en conte l'étymologie. Cette semaine, Dominique nous amène à la découverte de l'origine du mot gourmet, terme portugais provenant du français « gourmet », issu lui-même de l'anglais...
On rencontre aujourd’hui de plus en plus le mot « gourmet » dans les rues brésiliennes. Habituellement, il désigne un établissement où, selon le propriétaire, on mange magnifiquement bien, où la cuisine est de qualité supérieure.
Toutefois, le terme ne s’en est pas arrêté là et représente à chaque fois plus, non pas des restaurants, mais des plats ou boissons de grande qualité ( toujours selon le responsable). C’est ainsi que l’on trouve de surprenants « hamburgers gourmet » à faire tomber José Bové de sa chaise, et même des « pizzas gourmet », des « hotdogs gourmet », des « brigadeiros gourmet » (bouchée sucrée gourmet), des « cervejas gourmet » (bières gourmet) ou encore une « feijoada gourmet » (un plat traditionnel brésilien) ! Il s’agit actuellement d’une gourmetização de la cuisine brésilienne selon les propres termes d’un chef carioca.
Lorsqu’on s’intéresse à l’origine du mot « gourmet », on se rend compte, une fois de plus, que l’étymologie est pleine de surprises, car là où nous, les Français, serions apparemment certains de rencontrer un bon vieil ancêtre traditionnel de notre terre, béret sur la tête et baguette sous le bras, quelle n’est pas notre surprise de découvrir un terme d’origine finalement... anglaise. Oui, anglaise !
Incroyable - isn’t it ? - que ce terme provienne initialement de ce peuple si peu célèbre au long des siècles pour ses spécialités culinaires que le prix Nobel de littérature 1925, l’Irlandais George Bernard Shaw, s’est permis un jour de déclarer : « Si les Anglais sont capables de survivre à leur cuisine, ils peuvent survivre à tout ! ».
Le gourmet anglais ?
Toutefois, avec gourmet, pas d’échappatoire pour nous... Celui-ci possède bel et bien une origine anglaise, et dans ce cas, il s’agirait, de manière surprenante, du terme groom anglais, que l’on trouve encore dans les hôtels britanniques, et qui désignait initialement un jeune garçon, puis ensuite un valet.
Le terme semble avoir traversé la Manche au XIVe siècle, et, arrivé en terre de France, n’a pas perdu son temps, puisqu’il s’est immédiatement spécialisé, sur les terres du Cabernet-Sauvignon, du Merlot et du Pinot noir, pour représenter le courtier en vin ou encore le valet chargé de transporter les vins. Bien plus agréable que le groom anglais, n’est-ce pas ?
Ensuite le sens de notre gourmet a évolué au XVe siècle vers celui qui sait apprécier les bons vins... Et finalement, au XVIIIe, pour celui qui sait apprécier la bonne chère.
Rappelons que gourmet et son cousin gourmand ne sont pas interchangeables. En effet, gourmet demande une certaine connaissance de l’art culinaire, alors que gourmand insiste plus sur l’envie. Ainsi, on dit souvent que les enfants sont gourmands, et les critiques gastronomiques gourmets. Est-ce que les deux sont compatibles ? Il faudrait demander aux chefs français !
Vous souhaitez découvrir l'étymologie d'autres mots portugais ? Rendez-vous sur le site de Dominique Boyer.
Dominique Boyer est en train de terminer un livre dirigé seulement sur les termes de la gastronomie française entrés dans la langue portugaise. Il recherche actuellement des partenaires. Vous êtes une entreprise, un restaurant ou un chef intéressés par le projet et par la possibilité d'apparaître dans l'ouvrage ? N'hésitez pas à contacter Dominique au mail suivant : aulas.frances@hotmail.com. |