Coup double pour Ratinho. Après avoir reçu Jair Bolsonaro au début du mois, c’est Sérgio Moro qui est apparu dans son émission de divertissement de la chaîne SBT mardi soir. Pour ceux qui ne connaissent pas le Programa do Ratinho, c’est un peu comme si Patrick Sébastien avait reçu coup sur coup Emmanuel Macron et Nicole Belloubet dans son émission.
Ratinho, dont le fils a par ailleurs été élu gouverneur du Parana en octobre dernier, n’a pas manqué d’éloges à l’égard de Sérgio Moro, le qualifiant ni plus ni moins de « héros brésilien » : « Notre héros n’a pas de cape, ne vole pas, n’est pas de fer. Mais c’est l’unique héros brésilien du moment et il fait un travail fantastique. »
Une émission qui tombe en pleine publication de nouveaux messages
Un mélange de genre – même si cela était sous forme d’un entretien « sérieux » - que les internautes brésiliens n’ont pas forcément pardonné. D’autant plus que le site d’investigation The Intercept Brasil a dévoilé le même jour de nouveaux échanges entre l’ancien juge de Lava Jato et le procureur Deltan Dallagnol. Une conversation datant de 2017, qui montre que Sérgio Moro n’avait guère apprécié une enquête pour corruption visant l’ancien président Fernando Henrique Cardoso (PSDB). Et pour cause, il déclarait au procureur ne pas vouloir offenser une personnalité dont le soutien est important.
Le média alternatif brésilien Mídia Ninja pointe alors le manque de discernement de Sérgio Moro à l’égard de la presse :
A todo tempo Moro acusa o The Intercept de sensacionalista, mas ontem estava no Ratinho dando uma entrevista. Será que pra ele Ratinho é jornalismo e @ggreenwald, que ganhou o Pulitzer, maior prêmio de jornalismo do mundo, é sensacionalista?
— Mídia NINJA (@MidiaNINJA) 19 juin 2019
« Moro accuse depuis le début The Intercept d’être sensationnaliste, mais hier il était sur le plateau de Ratinho en train de donner une interview. Ça veut dire que pour lui, Ratinho fait du journalisme et Glenn Greenwald (cofondateur de The Intercept, ndr) qui a gagné le Pulitzer, le plus grand prix de journalisme au monde, fait du sensationnalisme ? »
D'autres ironisent sur le chemin parcouru par Sérgio Moro en quelques mois...
Moro 2018: Harvard e Yale! Moro 2019: Programa do Ratinho e Marcha pra Jesus!
— José Simão (@jose_simao) 18 juin 2019
« Moro 2018 : Harvard et Yale ! Moro 2019 : Programa do Ratinho et Marche pour Jésus ! »
... ou aiment faire des comparaisons avec d'autres personnalités, que ce soit Lula qui accorde des entretiens à la presse internationale ou Pabllo Vittar qui chante à l'ONU :
Pabllo Vittar na ONU se apresentando pra Rainha Elizabeth e Sérgio Moro sendo entrevistado pelo Ratinho
— Haddad Debochado (@HaddadDebochado) 19 juin 2019
« Pabllo Vittar à l'ONU pour rendre hommage à la reine Elizabeth et Sérgio Moro interviewé par Ratinho »
Mais Sérgio Moro a tout de même aussi pu compter sur des soutiens parmi les internautes brésiliens :
#DetonaTudoMoro muito boa entrevista do Moro no Ratinho , deu mais audiência que o futebol #BRAxVEN pic.twitter.com/e0SbWVQTFW
— Patrick Cruz 🔰 (@Patr1cK_CruZ) 19 juin 2019
« Excellent entretien de Moro par Ratinho, qui a fait plus d'audience que le football (Brésil-Venezuela, ndr) »
#DetonaTudoMoro Ministro Sergio Moro dando um show de competência e preparo para o cargo que exerce!
SBT...Programa do Ratinho pic.twitter.com/x47WX6HUO5— P.feitosa76 (@Pfeitosa76) 19 juin 2019
« Le ministre Sérgio Moro démontrant toutes ses compétences et sa préparation pour les fonctions qu'il exerce ! »
Néanmoins imperméable aux critiques, le ministre de la Justice et de la sécurité publique a comparu ce mercredi devant une commission du Sénat et s’est une nouvelle fois défendu sur l'affaire des messages. Il a nié avoir outrepassé ses fonctions et affirmé qu’il considère la divulgation de ces conversations comme une attaque à « Lava Jato et aux institutions ». Chez Ratinho, il avait aussi déclaré que ces fuites étaient le fruit d’un « groupe criminel » ayant pour principal objectif de discréditer les enquêtes en cours.